Free

Discours par Maximilien Robespierre — 21 octobre 1789-1er juillet 1794

Text
iOSAndroidWindows Phone
Where should the link to the app be sent?
Do not close this window until you have entered the code on your mobile device
RetryLink sent

At the request of the copyright holder, this book is not available to be downloaded as a file.

However, you can read it in our mobile apps (even offline) and online on the LitRes website

Mark as finished
Font:Smaller АаLarger Aa

Maximilien Robespierre (1758-1794), Discours sur la nécessité d'instituer un pouvoir plus unitaire et plus actif que celui du conseil exécutif, prononcé à la Convention nationale le 30 mars 1793 (30 mars 1793)

Je demande à parler sur les nouvelles des armées. Citoyens, les nouveaux événements dont vous venez de recevoir la nouvelle ne doivent pas nous étonner. Pour moi, je suis loin de me décourager de la marche rétrograde de notre armée. Quelque affligeant qu'il soit de voir les courageux Liégeois abandonnés à la merci des tyrans dont nous les avons délivrés, il n'est pas pour des hommes de revers réels. Nous irons à l'ennemi, nous terrasserons encore une fois les tyrans qui veulent attenter à notre liberté. Mais il faut que l'ardeur guerrière des défenseurs de la patrie soit secondée par la sagesse et le courage des représentants de la nation. Pour moi, j'avoue que mes notions en politique ne ressemblent en rien à celles de beaucoup d'hommes. On croit avoir tout fait en ordonnant qu'il serait fait un recrutement dans toutes les parties de la république, et moi je pense qu'il faut encore un régulateur fidèle et uniforme de tous les mouvements de la révolution. Je ne doute pas du courage de nos soldats, personne ne doit en douter; mais comment veut-on que cette ardeur se soutienne, si les soldats voient à leur tête des chefs coupables et impunis? Je ne vois pas que l'on se soit encore occupé de tel officier, dont la trahison n'a été justifiée par personne. Vous avez entendu vos commissaires vous dire que, lors de la dernière action, la plupart des officiers avaient abandonné leur poste. Vous avez entendu vous dénoncer celui qui a dit à Dumouriez: "Je n'aime pas la république, mais je combattrai pour vous." Vous avez entendu vous dénoncer celui qui disait: "Si la neutralité venait à être rompue entre la France et l'électeur palatin, il ne faudrait pas me laisser dans cette armée, car, sujet de l'électeur, je ne pourrais répondre de moi." Stengel, enfin, est convaincu de trahison, et le décret d'accusation n'est pas encore porté contre lui! Quels succès pouvons-nous attendre, si nous pardonnons de pareils attentats? Quant à Dumouriez, j'ai confiance en lui, par cette raison qu'il y a trois mois il voulut entrer dans la Hollande, et que, s'il eût exécuté ce plan, la révolution était faite en Angleterre, la nation serait sauvée et la liberté établie.

Dumouriez n'a eu jusqu'ici que des succès brillants, et qui ne me sont pas à moi une caution suffisante pour prononcer sur lui. Mais j'ai confiance en lui, parce que son intérêt personnel, l'intérêt de sa gloire même est attaché au succès de nos armes; mais n'est-il pas prouvé que, dans l'affaire d'Aix-la-Chapelle, la république a été trahie par des officiers qui n'étaient pas à leur poste, par ceux surtout qui se font rendus coupables de faits dénoncés par vos commissaires? Je demande enfin que Stengel soit mis en état d'accusation; s'il a fui, que ses biens soient confisqués, et que la conduite des autres officiers soit examinée.

Ce n'est pas assez d'attacher ses regards sur un fait isolé, sur un individu. En examinant l'ensemble, la marche de la révolution, ou trouve que la même cause enfante tous nos maux; je veux dire l'indulgence coupable que l'on a toujours eue pour les ennemis du bien public. Il est difficile de concevoir comment des hommes à qui l'honneur de réformer le monde semble être réservé tremblent devant un ancien aristocrate; je ne sais par quelle fatalité la loi ne peut atteindre encore un ci-devant noble, un riche même; mais je dis que tant que les traîtres seront impunis, la nation sera toujours trahie. Il ne suffit pas de remporter des victoires éclatantes, il faut faire la guerre avec vigueur, avec audace même; il faut la finir bientôt. La guerre ne peut pas être longue; il est un terme aux dépenses énormes d'une nation généreuse, et ce terme ne peut pas être éloigné. Il faut que cette campagne finisse la guerre, il faut que tous les despotes soient renversés, et la liberté établie sur les débris de toutes les aristocraties; pour cela, il faut des représentants du peuple fermes et plein d'énergie: sans cela, nous ne verrons que troubles dans l'intérieur, et nous n'aurons au dehors que des succès brillants. Nous verrons peut-être même s'établir le système de nous donner alternativement des revers et des succès, jusqu'à ce que l'épuisement de nos forces et de nos richesses nous entraîne dans l'abîme. Tout vous commande donc de jeter un oeil vigilant sur l'armée; voyez ce qui se passe autour de nous: déjà à Lyon l'aristocratie relève une tête insolente, et à Montpellier les patriotes sont opprimés et désarmés par l'ordre despotique d'un directoire oppresseur. Les exemples des persécutions se multiplient contre les plus chauds amis de la liberté.

Tandis que le patriotisme de nos braves frères d'armes porte la terreur au dehors, au dedans il est abattu per les coups de l'aristocratie. Je vous conjure, au nom de la patrie, de changer le système actuel de notre gouvernement; et, pour cela, il faut que l'exécution des lois soit confiée à une commission fidèle, d'un patriotisme épuré; une commission si sûre, que l'on ne puisse plus vous cacher ni le nom des traîtres ni la trame des trahisons. Eh quoi! citoyens, si Lacroix et Danton n'étaient pas venus vous instruire, vous seriez encore dans l'ignorance profonde des circonstances qui ont accompagné l'affaire d'Aix-la-Chapelle! Rappelez-vous le contraste de ce que Lacroix vous a dit avec les lettres que les généraux ont écrites au ministre de la guerre.

La veille de l'arrivée des commissaires, nous étions enivrés de la conquête de la Hollande; nous ne rêvions que succès: un mot de vos commissaires dissipa ce prestige, et fit connaître l'austère vérité. Ce mélange de bonnes et de mauvaises nouvelles ressemble parfaitement à ce qui arrivait dans l'ancien régime, et quand Lafayette commandait nos armées. Il importe donc de nous défier de tout ce qui ne porte pas un caractère de patriotisme marqué.

Il nous faut un gouvernement dont toutes les parties soient rapprochées. Il existe entre la Convention et le conseil exécutif une barrière qu'il faut rompre, parce qu'elle empêche cette unité d'action qui fait la force du gouvernement. Voyez ce qui se passe à Londres; voyez avec quelle promptitude s'exécutent toutes les résolutions du gouvernement britannique. C'est que toutes les autorités, divisées en apparence, se réunissent en effet contre la liberté française.

Chez nous, au contraire, le conseil exécutif, presque isolé, ne communique avec vous non pas seulement par les moyens des comités, mais par celui de tel ou tel individu plus intimement lié à telle ou telle partie du ministère. Les comités se saisissent d'une affaire; sur leur rapport, vous prenez des décisions précipitées. Ainsi, vous avez déclaré la guerre tantôt à un peuple, tantôt à un autre, sans avoir consulté quels étaient vos moyens de soutenir vos résolutions: ainsi, la Convention marche sans se rendre compte de ce qu'elle a fait et de ce qu'elle a à faire. Et c'est ici, citoyens, que j'appelle toute votre attention. Ne conviendrez-vous pas que, placés par votre organisation même au centre de l'Europe politique, au centre de tous les peuples qui veulent être libres, vous deviez vous assurer les moyens de communiquer avec eux et d'exciter ces mouvements que le despotisme a su employer si habilement? Ne conviendrez-vous pas que vous devez employer quelque chose de cet art dont il se sert pour diviser ses ennemis? Qu'est-il résulté des opérations politiques de votre cabinet? quels ennemis a-t-il écartés? quels alliés vous a-t-il faits, même parmi les peuples qui paraissaient être portés pour vous?..

Ce qu'il en est résulté, c'est que tous les gouvernement» vous ont tour à tour déclaré la guerre; que tour à tour ils ont fait des démarches que vous avez réputées hostiles; que, dans aucun pays étranger, il ne s'est fait un mouvement en votre faveur. Quels sont donc les résultats visibles des opérations invisibles d'un ministre dont vous n'avez jamais envisagé la conduite? Une calomnie perpétuelle contre la révolution, l'envoi avec profusion, dans tous les pays, de libelles où les principaux événements de notre révolution étaient dénaturés, et dont l'effet était d'aliéner l'opinion des peuples et de dénigrer les hommes qui ont le plus combattu pour la liberté. Voyez ce qui se dit, ce qui se fait chez l'étranger; voyez ce qui se dit, ce qui se fait parmi nous: le même esprit anime et nos ennemis et nos agents; ils suivent tous le même système. Ici, j'articule un fait qui ne pourra être nié: c'est qu'il a existé parmi les agents français auprès des puissances étrangères une opposition constante à la réunion des peuples à notre république, et que ceux qui l'ont opérée ont eu à lutter contre la volonté de ceux qui étaient chargés de la protéger. J'affirme que Dumouriez proposa, il y a trois mois, l'invasion de la Hollande, et qu'elle fut toujours repoussée par le comité diplomatique; interrogez là-dessus les patriotes bataves, ils vous diront que, pendant ce délai, on a donné le temps à l'intrigue de se développer, et aux despotes de se rassembler. Et comment auriez-vous pu prendre des mesures justes à cet égard, lorsque vous ignoriez les faits?

J'ai été amené à développer ces idées par cette conviction intime, que tout le mal vient de ce que nous n'avons pas un gouvernement assez actif. Je conclus à ce que beaucoup de réformes soient faites dans cette partie, parce que c'est la plus grande mesure de salut public que vous puissiez prendre, et que sans elle vous irez toujours de révolution en révolution, et vous conduirez enfin la république à sa perte.

* * * * * * * * *

Maximilien Robespierre (1758-1794), Discours contre le comité de sûreté générale, et en particulier contre Brissot, prononcé à la Convention nationale le 3 avril 1793 (3 avril 1793)

Citoyens, dans ce moment-ci je me dois à moi-même, je dois à la patrie une profession de foi. Nommé membre du comité de défense générale, mais convaincu que les principes qui doivent sauver la patrie ne peuvent pas y être adoptés, je déclare que je ne me regarde plus comme faisant partie de ce comité. Je ne suis pas bien convaincu qu'un système où la royauté serait combinée avec une sorte de constitution aristocratique déplairait à certains membres de ce comité; je ne suis pas bien convaincu qu'un pareil système ne conviendrait pas à certaines gens qui, quelquefois, parlent de patriotisme, mais qui nourrissent et conservent dans leur âme une haine profonde pour l'égalité. Je ne veux pas délibérer avec ceux qui ont parlé le langage de Dumouriez, avec ceux qui ont calomnié les hommes à qui maintenant Dumouriez déclare une guerre implacable, avec ceux qui, à l'exemple de Dumouriez, ont calomnié Paris et la portion de l'assemblée vraiment amante de la liberté.

 

S'il ne m'est pas donné de sauver la liberté, je ne veux pas du moins être le complice de ceux qui veulent la perdre; je ne veux pas être membre d'un comité qui ressemble plutôt à un conseil de Dumouriez qu'à un comité de la Convention nationale.

(Murmures à la droite de la tribune.)

Robespierre. J'invoque à l'appui de ce que je dis le témoignage de Dumouriez lui-même, car, dans une de ses lettres, il a dit que le comité dont je parle était excellent, à l'exception de six membres: or, ces six membres, dont je m'honore de faire partie, ne peuvent obtenir la majorité; enfin, je ne veux pas être d'un comité dont la plupart des membres poursuivent avec acharnement les patriotes, tandis qu'ils gardent le silence sur les crimes de nos généraux.

Je ne puis vous dissimuler ma surprise de voir que ceux qui, depuis le commencement de la dernière révolution, n'ont cessé de calomnier ce côté (désignant le côté gauche) qui fut et qui sera toujours la patrie de la liberté, soient restés muets sur les crimes de Dumouriez, et qu'il n'y ait que nous, tant calomniés, qui ayons élevé la voix sur les perfidies de ce traître.

Brissot. Je demande la parole après Robespierre.

Robespierre. Pour étouffer la voix de la vérité dans les moments critiques pour le salut public, on a coutume d'amollir le courage des patriotes par certaines idées de réunion qu'on a l'adresse de jeter en avant; mais moi, je fais profession de croire que l'amour seul de la liberté doit réunir les hommes, et je me défie de ces protestations brusques faites dans des moments critiques où l'on croit avoir besoin de feindre un rapprochement que l'on est bien loin de désirer: je me défie de ceux qui, dans des moments critiques, m'ont tendu la main, et qui, le lendemain, m'ont calomnié. Et, puisque Brissot demande la parole pour me foudroyer, je vais faire sur Brissot l'application de ce que je viens de dire. Je ne veux point sacrifier la patrie à Brissot, et, Brissot eût-il la confiance de cette assemblée, je déclare que si j'avais des faits certains à alléguer contre lui, je ne balancerais pas un moment à le démasquer.

J'applique à Brissot le principe que j'ai avancé.

J'ai dit que je ne voulais point délibérer avec les amis de Dumouriez: eh bien! Brissot a été et est encore l'intime ami de Dumouriez; c'est l'histoire de Dumouriez à la main que je veux le juger. Brissot est lié à tous les fils de la conspiration de Dumouriez. Je déclare qu'il n'y a pas un homme de bonne foi, qui ait suivi la vie politique de Brissot, qui puisse ne pas être convaincu de ce que j'avance.

Je déclare qu'il n'y a pas une seule circonstance où Brissot n'ait pris la défense de Dumouriez. Le système de Dumouriez a été de nous engager dans une guerre funeste et périlleuse, afin de la faire tourner contre la liberté. Dumouriez et Brissot furent les premiers à proposer la guerre contre l'Autriche. Et remarquez que nous leur disions: Avant de déclarer la guerre à l'Europe, abattez la cour et remplacez vos généraux. Que nous répondait-on? On excusait la cour; on nous disait que dire du mal de Lafayette et des généraux, c'était troubler la discipline militaire, c'était se déclarer les ennemis de la patrie; on nous montrait tous les peuples, et principalement la Belgique, disposés à venir au devant des Français, et on nous faisait voir l'étendard de la liberté flottant sur le palais des rois.

Cependant cette guerre commença par des revers, et, malgré cela, on protégeait les généraux, et on les investissait d'un pouvoir dictatorial sur la motion des chefs de parti, ennemis jurés des patriotes.

Après l'époque du 10 août, nous étions cernés de despotes qui avaient juré la perte de la liberté, et qui avaient combiné leurs projets avec les ennemis de l'intérieur; au mois de septembre, nous apprîmes la prise de Verdun et que l'ennemi se portait sur Paris: personne jusqu'alors n'avait donné avis de son approche. Cependant quels étaient les ministres? C'étaient ceux qu'avait fait nommer Brissot. Quels étaient les membres qui composaient la commission des Vingt-et-Un? Brissot et ses partisans. Et ces ministres, nommés par Brissot, vinrent proposer à l'assemblée d'abandonner Paris avec le roi et sa famille, qui étaient alors au Temple! Et si un autre ministre, qui n'est pas du parti Brissot, n'était venu apprendre au peuple ce que lui cachaient les hommes qui le dirigeaient; si la France ne s'était pas levée en masse, les ennemis seraient venus à Paris, et la république serait anéantie!

Dumouriez fut alors nommé pour commander l'armée qu'avait abandonnée Lafayette, et ce furent Brissot et ses partisans qui le portèrent à cette place. Je ne sais ce qu'eut fait Dumouriez, si la France ne s'était levée tout entière; mais ce que je sais, c'est que Dumouriez conduisit poliment le roi de Prusse aux frontières; ce que je sais, c'est que l'armée française était furieuse de voir échapper les ennemis, quand elle eut pu les écraser; ce que je sais, c'est que Dumouriez se montra aussi respectueux envers le monarque prussien, qu'il se montre maintenant insolent envers les représentants du peuple français; enfin, ce que je sais, c'est qu'il ravitailla l'armée ennemie lorsqu'elle était prête à périr de misère et de faim.

Dumouriez, au lieu d'exterminer les Prussiens, qui s'étaient si imprudemment engagés dans le coeur même de la France, vient à Paris. Après avoir passé quelques jours avec les détracteurs des amis de la liberté, dans des festins scandaleux, il va dans la Belgique, où il débute par des succès éclatants pour ceux qui ne l'avaient pas apprécié.

Dumouriez, après avoir établi son empire dans cette partie de la Belgique, part pour la Hollande: s'il fût parti trois mois plus tôt, le succès de cette expédition était assuré. J'ai cru un moment que la gloire retiendrait pendant quelque temps Dumouriez dans les bornes de ses devoirs, et qu'il n'attenterait à la liberté de son pays qu'après avoir abattu les despotes conjurés contre elle; alors Dumouriez, dont les projets auraient été à découvert, me paraissait facile à renverser.

Dumouriez, après s'être emparé de quelques places de la Gueldre, se découvre tout à fait, et, tandis que tout était arrangé pour évacuer la Belgique, les généraux allemands, en partie donnés par Brissot, qui commandaient l'armée devant Maëstricht, nous trahissent. Si l'on ose nier ces faits, j'en donnerai des preuves plus authentiques.

A son retour de la Gueldre, Dumouriez se plaint-il d'avoir été trahi? Non. Il jette au contraire un voile sur tous les faits: il fait l'éloge des généraux; il loue Miranda et Lanoue, généraux très connus par leur incivisme; il impute tous nos malheurs aux soldats; il veut persuader à la France que ses armées ne sont composées que de lâches et de voleurs. Nos revers se succèdent. Il donne une bataille, il la perd; il en accuse l'aile gauche de son armée, qui, dit-il, a plié; mais cette aile gauche était commandée par Miranda, par son ami, et l'on doit se rappeler que Dumouriez disait à son armée: "Ne vous découragez pas; surtout ayez confiance en vos généraux: ils sont mes élèves, ils sont mes amis."

Dumouriez avait établi l'aristocratie dans la Belgique, eu réintégrant les officiers municipaux destitués par vos commissaires; Dumouriez avait fait des emprunts énormes; Dumouriez s'était emparé du trésor public, après en avoir fait emprisonner les gardiens: Dumouriez avait assuré sa fortune et sa trahison; ensuite il déclare la guerre à la Convention nationale; il distingue deux partis qui la composent: l'un qui est subjugué (et Brissot doit se ranger dans ce parti) et l'autre qui domine.

Dumouriez dit qu'il vient protéger ce parti, qu'il dit être opprimé; il dit que Paris donne la loi à la nation, et qu'il faut anéantir Paris, et c'est dans ce moment que nous délibérons, et que l'on me fait un crime de penser que Dumouriez a ici des partisans, et que ces partisans sont les hommes qu'il veut protéger! On m'en fait un crime, lorsqu'ils tinrent toujours un langage qui devrait les faire reconnaître! on m'en fait un crime, lorsqu'ils firent tout pour se partager la puissance! on m'en fait un crime, lorsque les Anglais, accusés d'avoir des partisans dans cette enceinte, menacent nos côtes! enfin, l'on m'en fait un crime, lorsque Dumouriez s'efforce de décourager la nation, en lui disant que les troubles qui nous agitent nous mettent dans l'impossibilité de résister aux ennemis extérieurs, en même temps que nous réduirons les révoltés de l'intérieur; lorsque Dumouriez méprise la nation au point de dire qu'elle n'a plus d'autre parti à prendre que de transiger avec les ennemis! Et il se propose pour médiateur, lorsqu'il propose de diviser son armée et de marcher avec une partie sur Paris...

Voilà une partie de mes doutes; voilà la source dans laquelle nous devons puiser les moyens de sauver la liberté. Sauver la liberté!.. Mais la liberté peut-elle se sauver, lorsque les amis du roi, lorsque ceux qui ont pleuré la perte du tyran, et qui ont cherché à réveiller le royalisme, paraissent nos protecteurs, paraissent les ennemis de Dumouriez, lorsqu'il est évident à mes yeux qu'ils "ont ses complices.

Voilà mes faits: ils ne convaincront que les hommes de bonne foi, mais je déclare que lorsque Dumouriez est d'intelligence avec l'homme que j'ai nommé, et avec tous ceux...

(Quelques voix: Nommez-les donc!)

Robespierre. Je ne veux point convaincre les conspirateurs ni les ennemis de la France; je ne veux que dire la vérité, et, quand les hommes que j'ai désignés auront assassiné la liberté et ses défenseurs, on dira qu'au moment où ils allaient exécuter leur complot liberticide, je disais la vérité, et que je démasquais les traîtres.

Je déclare que la première mesure de salut à prendre, c'est de décréter d'accusation tous ceux qui sont prévenus de complicité arec Dumouriez, et notamment Brissot.

(Applaudissements des tribunes.)

* * * * * * * * *