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Mémoires touchant la vie et les écrits de Marie de Rabutin-Chantal, Volume 3

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Louise-Françoise de Bussy, marquise de Coligny, veuve de Gilbert de Langheac, avait trente-huit ans lorsqu'elle épousa de la Rivière; elle s'était mariée à M. de Coligny, à Chaseu, le 5 novembre 1675; le marquis de Coligny mourut en 1676, à Condé, dans l'armée de M. de Schomberg. Madame de Coligny en eut un enfant et tout son bien. (Voyez Lettres choisies de M. DE LA RIVIÈRE, t. I, p. 25 et 26, et sur la Rivière, avant le mariage, BUSSY, Lettres, t. III, p. 233 et 234; et t. V, p. 165.)

CHAPITRE XII

Page 199, ligne 27, note 1: DARU, Histoire de Venise.

M. Daru ne paraît point avoir connu les Mémoires du duc de Navailles; s'il les avait consultés, il n'aurait pas fait de cette partie de la guerre de Candie, à laquelle les Français prirent part, un récit si peu exact; il ne se serait pas contenté des seules assertions des auteurs vénitiens. Sans doute on ne saurait excuser l'historien qui, même dans un but patriotique, permet à sa plume d'altérer la vérité: c'est pour lui un devoir de n'épargner aucun soin pour la connaître, et d'avoir le courage de la dire même lorsqu'elle lui répugne; mais ce devoir est encore plus impérieux quand l'honneur national se trouve, comme dans cette circonstance, inculpé par des témoins suspects et intéressés à rejeter sur nos compatriotes leurs fautes et leurs malheurs.

Page 203, lignes 15 et 17: Il semble qu'on ne peut guère douter du fait, puisqu'il est attesté par une lettre de Boileau.

Je ne parle pas du témoignage de Louis Racine, parce que dans les Mémoires sur la vie de Jean Racine (Lausanne, 1747, p. 80) il s'appuie sur la lettre de Boileau, ce qui prouve qu'il ne savait pas la chose par son père ni même par tradition de famille; et Louis Racine n'a publié ses Mémoires que soixante-dix-sept ans après la première représentation de Britannicus.

Page 206, note 3, ligne dernière: GEOFFROY, Œuvres de Racine, t. III, p. 11.

Les doutes de l'éditeur ne sont pas fondés; Henriette mourut avant l'impression de la pièce de Racine.

Page 207, lignes 19 et 21: L'abbé de Villars, le spirituel auteur des Lettres du comte de Gabalis sur les sylphes, les gnomes et les salamandres.

Pope a mis à profit ces lettres dans son poëme badin et médiocre, selon nous, de la Boucle de cheveux enlevée (The rape of the lock).

Page 209, ligne 23: Pour envoyer l'effroi de l'un à l'autre pôle.

Dans l'édition de 1692, donnée par Thomas Corneille, il y a:

 
Pour envoyer l'effroi sous l'un et l'autre pôle.
 

Si l'autre variante est autorisée par quelque édition antérieure, il faut la préférer; sinon, il faut rétablir celle de l'édition de Thomas Corneille, qui est la bonne.

Page 213, ligne 1: Un gentilhomme nommé Mathonnet.

Voici le passage de la lettre de Louvois: «Il est à propos que vous continuiez à garder soigneusement le sieur Mathonnet pour le faire parler, Sa Majesté sachant très-bien que, pendant qu'il a été à Paris, il allait souvent à Chaillot voir mademoiselle d'Argencourt; et il faut qu'il soit de cette cabale-là.»

Page 218, ligne 6: La Feuillade,..... laid de visage, ayant un teint bilieux et bourgeonné.

La mère du duc de la Feuillade fut cette demoiselle de Roannès à laquelle Pascal inspira de tels sentiments de dévotion qu'elle ainsi que son frère le duc de Roannès ne voulaient pas se marier, et firent vœu de chasteté; ce qui mit dans une telle fureur le père de ces deux personnes que le concierge de l'hôtel de Roannès monta à l'appartement de Pascal, logé dans cet hôtel, pour le tuer. M. de la Feuillade, cadet de l'archevêque d'Embrun, épousa mademoiselle de Roannès, à laquelle son frère qui voulut rester célibataire, transmit tous ses biens et son titre. Elle eut de ce mariage trois enfants avant de mettre au monde le duc de la Feuillade, qui fut maréchal. Le premier de ces enfants mourut en naissant, le second fut un fils contrefait et le troisième une fille naine, qui mourut à dix-neuf ans. Conférez un morceau curieux sur la biographie de mademoiselle de Roannès, par M. Victor Cousin, Bibliothèque de l'École des chartes, t. V, p. 1 à 7.

Page 221, ligne 12: S'abandonnant sans scrupule à des plaisirs réprouvés.

Nous avons déjà signalé les dangers de ces travestissements d'hommes en femmes, que la trop indulgente Anne d'Autriche permettait dans les ballets durant l'enfance et l'adolescence même du roi. L'exemple de l'abbé de Choisy, dans sa jeunesse, en fut une preuve bien étrange. Il a lui-même pris plaisir à écrire toutes les aventures amoureuses que ces travestissements lui ont procurées, et elles passent en libertinage licencieux les fictions du détestable roman de Louvet, auquel il a servi de modèle (Voyez l'Histoire de la comtesse Desbarres; Anvers, 1735, in-12, in-18, p. 138.—Vie de l'abbé de Choisy, 1742. in-8o, p. 22-26.—MONMERQUÉ, Notice sur l'abbé de Choisy et sur ses Mémoires, t. LXIII de la collection des Mém. sur l'hist. de Fr., p. 123 à 146.)

Page 224, ligne 19: Mais lui n'eut aucun doute.

Sismondi est, de tous les historiens, celui qui a le mieux raconté cette mort; il hésite dans son opinion, et ne semble pas bien persuadé que le duc d'Orléans ne fut pas coupable; puis il incline ensuite pour le cholera-morbus. Les caractères de l'agonie de la princesse et de ses derniers moments, si bien décrits dans la relation de Feuillet, n'ont point le caractère de cette maladie; et le procès-verbal d'autopsie, quoique concluant qu'il n'y a pas eu d'empoisonnement, constate, suivant nous, le poison par la description de l'état des viscères. Ce procès-verbal a été publié par Bourdelot, et se trouve dans les Pièces intéressantes, de Poncet de la Grave, que j'ai citées. Les médecins anglais envoyèrent en Angleterre une relation toute contraire à celle des médecins français. Henriette elle-même, aussitôt qu'elle eut avalé le verre d'eau de chicorée et éprouvé des douleurs, déclara qu'elle était empoisonnée. Enfin, le rapport fait à Louis XIV par Vallot, son médecin, daté de Versailles le 1er juillet 1670, dont M. Gault de Saint-Germain a publié la conclusion, implique que l'opinion de ce médecin était pour l'empoisonnement. La lettre de Bossuet aura été fabriquée dans le temps, comme les avis des médecins, pour donner le change à l'opinion. Philibert de la Mare, qui demeurait en province, a pu croire à son authenticité, mais à la cour personne n'aurait pu s'y tromper; c'est probablement ce qui aura été cause qu'on n'a pas osé lui donner une grande publicité.

CHAPITRE XIII

Page 227, ligne 31, note 3: SÉVIGNÉ, Lettres (23 janvier 1671).

Cette lettre a été publiée pour la première fois par M. Monmerqué. Dans le recueil des Lettres de BUSSY, comme dans celui des Lettres de madame de SÉVIGNÉ au comte de Bussy, 1775, p. 21, no 12, on en avait donné les premières lignes, où il n'est pas dit un mot de la princesse de Condé. Ce récit, fait par MADEMOISELLE (Mémoires, t. XIII, p. 297), s'accorde plus complétement avec celui de Guy-Patin qu'avec celui de madame de Sévigné; MADEMOISELLE dit: «Un joueur qui avait été son valet de pied, à qui elle avait accoutumé de faire quelques largesses, entra dans sa chambre pour lui demander de l'argent; sa demande fut accompagnée de manières qui firent croire qu'il avait envie d'en prendre ou de s'en faire donner. L'abbé Lainé, sur l'avis qu'on avait donné que le valet de pied s'était sauvé dans le Luxembourg, me vint demander la permission de le laisser prendre; il ne s'y trouva point, et il fut pris hors la ville.»

Page 229, lignes 5 et 6: Des gens que le prince avait chargés de garder.

MADEMOISELLE accuse le duc d'Enghien, qu'elle n'aimait pas, d'avoir conseillé à Condé ce traitement envers sa mère: «Il était bien aise, disait-on, d'avoir trouvé un prétexte de la mettre dans un lieu où elle ferait moins de dépense que dans le monde.» D'après ce que mande madame de Montmorency à Bussy, ceci paraît être calomnieux. Le duc d'Enghien était un caractère dur, il est vrai; mais les autres mémoires du temps ne permettent pas de croire qu'il fût à ce point méchant, ingrat, fils dénaturé. Lord Mahon, dans sa Vie du grand Condé, a pris fait et cause avec chaleur pour la princesse, et il transcrit à ce sujet l'extrait d'une correspondance secrète tirée de la secrétairerie d'État de la cour de Londres, qui prouve seulement que le correspondant avait été mal informé, ou plutôt qu'il donnait le récit de cette affaire comme on désirait que la cour de Londres en fût instruite et conformément au bruit que l'on fit courir dans Paris. Cependant l'extrait de cette correspondance est curieux, et nous apprend que la princesse fit tous ses efforts pour sauver Duval, dont Condé voulait la mort. Il est facile d'atténuer les torts de la princesse par ceux que son époux eut envers elle, mais il n'est pas possible d'en douter. Le silence des contemporains après son malheur, et leur insensible indifférence, en dit encore plus que leurs témoignages accusateurs. Conférez lord MAHON'S, Life of great Condé, 1845, in-12, part. II, p. 269 à 275.—Voici le passage de Coligny, p. 26, sur la conduite de la princesse en 1650: «Le marquis de Cessac, dont j'ai dit un mot, s'attacha à madame la princesse, ou plutôt la princesse à lui; car il faut que ces dames-là fassent plus de la moitié du chemin si elles veulent avoir des galants, qu'autrement le respect ferait taire. Comme elle n'était pas pourvue d'un grand esprit, ce défaut et la passion lui firent faire tant de minauderies indiscrètes que tout le monde connut aisément ses affaires.»

 

Ce témoignage est celui du plus virulent ennemi de Condé et de son plus grand détracteur.

Page 234, ligne 9, et page 235, ligne 7: La maréchale de la Ferté.

Quand il est fait mention, dans les mémoires et les libelles du temps, de madame de la Ferté ou de la duchesse de la Ferté, il faut se garder de confondre la belle-mère et la belle-fille, toutes deux pouvant être désignées de la même manière. La maréchale était Madeleine d'Angennes de la Loupe; la belle-fille était Marie-Isabelle-Gabrielle-Angélique de la Mothe-Houdancourt, duchesse de la Ferté, fille de la maréchale de la Mothe-Houdancourt, ancienne gouvernante des enfants de France et sœur cadette des duchesses d'Aumont et de Ventadour. La maréchale de la Ferté était la sœur de Catherine-Henriette d'Angennes, comtesse d'Olonne, dont les mœurs furent encore plus déréglées que celles de la duchesse.

CHAPITRE XIV

Page 246, ligne 9: La faiblesse de la santé de la princesse de Condé.

Guy-Patin dit que dans cette prévision la reine mère écrivit à Gaston pour mettre obstacle à ce mariage.

Page 282, ligne 3: Il finit par subir une rigoureuse détention.

La chronologie des faits relatifs à la biographie de Lauzun n'est pas facile à déterminer. Saint-Simon place en 1669 l'affaire relative à l'espionnage de madame de Montespan par le moyen d'une femme de chambre séduite par Lauzun, et celle de la place de grand maître de l'artillerie sollicitée par lui, et le beau trait du roi jetant sa canne par la fenêtre dans la crainte de se laisser aller à en frapper un gentilhomme. Mais alors tout cela paraît antérieur au mariage, ce qui n'est pas probable. Saint-Simon a écrit plus de quarante ans après ces faits, et s'est évidemment trompé sur les dates. Je pense, avec M. Petitot (t. XL, p. 356), que ce fut la conduite insolente de Lauzun avec madame de Montespan qui détermina le roi à le faire arrêter.

Page 283, lignes 1 et 2: Il obtint par ses services de nouveaux grades et de nouveaux honneurs.

Des lettres de duc furent données à Lauzun en 1692. Lauzun mourut en 1723 et survécut huit ans à Louis XIV.

CHAPITRE XV

Page 296, ligne 22: Mademoiselle Dugué-Bagnols.

Le chevalier Perrin nous apprend, dans son édition des Lettres de madame de Sévigné, que mademoiselle Dugué-Bagnols fut mariée depuis à M. Dugué-Bagnols, son cousin.

Page 297, ligne 19: C'était la première femme de Claude de Saint-Simon; elle succomba le 2 décembre 1670.

Diane-Henriette de Budos, duchesse de Saint-Simon, mourut, selon l'assertion de M. Monmerqué (Lettres de Sévigné, t. I, p. 208), à quarante ans; et comme Saint-Simon dit que son père l'épousa en 1644, il en résulterait qu'elle n'aurait eu que quatorze ans lorsqu'elle s'est mariée. Comme l'âge nubile était alors fixé par les lois à douze ans, cela n'est pas impossible, mais cela est peu probable.

C'est en 1743 que Saint-Simon a écrit le volume de ses Mémoires qui concerne les années 1722 et 1723. J'avais dit cela dans une note qui est à la page 453 de mon deuxième volume, 1re édition; mais je suis obligé de le répéter, parce qu'il y a deux fautes d'impression dans les chiffres de cette note. J'ajouterai ici que Saint-Simon, pour ce qui concerne les dates et les généalogies, s'est beaucoup servi des Mémoires manuscrits de Dangeau, c'est-à-dire de ses portefeuilles.

Page 298, ligne 12: Et, par la grande mortalité qu'éprouva la population.

D'après un recueil statistique de Paris, déposé à la Bibliothèque du Roi, le nombre des naissances dans cette capitale fut de 16,810, celui des décès de 21,460; le nombre des décès surpassa donc les naissances de 4,651.

CHAPITRE XVI

Page 303, ligne 29: Le gouverneur et son lieutenant se trouvèrent tous les deux absents.

Dans une semblable circonstance, en 1673, Brulart, premier président du parlement de Bourgogne, écrivit à Louvois qu'en l'absence du gouverneur et de son lieutenant général le gouvernement de la province lui appartenait de droit. Voyez la lettre de BRULART à Louvois, dans l'ouvrage intitulé Une province sous Louis XIV, par M. Thomas, 1844, in-8o, p. 431.

Page 312, lignes 3 et 4: Elle écrivait à madame de Sévigné.

Il est probable que madame de Sévigné avait conçu cette aversion pour les filles de Sainte-Marie d'Aix par les lettres de sa filleule; elle la manifeste en toute occasion, et elle appelle ces religieuses des baragouines. Elle montre, au contraire, une prédilection particulière pour les filles de cet ordre, fondé par son aïeule, qui étaient dans d'autres couvents. Il est évident aussi, d'après le passage suivant de la lettre de madame de Sévigné, du 24 juillet 1680, que, pour avantager les autres enfants de madame de Grignan, on voulait que Marie-Blanche fît des vœux; sa vocation paraît au moins douteuse. «Votre petite d'Aix me fait pitié, d'être destinée à demeurer dans ce couvent perdu pour vous; en attendant une vocation, vous n'oseriez la remuer, de peur qu'elle ne se dissipe. Cette enfant est d'un esprit chagrin et jaloux, tout propre à se dévorer. Pour moi, je tâterais si la Providence ne voudrait pas bien qu'elle fût à Aubenas; elle serait moins égarée.» La sœur de M. de Grignan était abbesse du couvent d'Aubenas, et madame de Sévigné espérait que sa petite-fille pourrait un jour lui succéder. Nous reviendrons, dans la suite de ces Mémoires, sur ce passage de la lettre de madame de Sévigné et sur les mots perdu et égarée, que Grouvelle, M. Monmerqué et Gault de Saint-Germain ont expliqués diversement.

CHAPITRE XVII

Page 325, ligne 12: Une très-belle femme, madame de Valence, qui s'était faite religieuse.

J'ai cité ici l'édition de la Haye, t. I, p. 20, parce que c'est la seule qui dans cet endroit nous semble donner le vrai texte de madame de Sévigné. Ce texte est ainsi:

«Vous me dites des merveilles du tombeau de Montmorency et de la beauté de madame de Valence.»

Les premiers éditeurs des Lettres de madame de Sévigné, ne trouvant aucune mention de cette madame de Valence dans toute la correspondance de madame de Sévigné, ont substitué aux mots qui la concernent «et de la beauté de mesdemoiselles de Valançai» (lettre du 18 février 1671, t. I, p. 332, édit. G.), parce qu'en effet madame de Sévigné, en passant aussi à Moulins cinq ans après madame de Grignan, lui avait écrit de cette ville que les petites-filles de madame de Valançai, que madame de Grignan y avait vues, sont belles et aimables (lettre du 17 mai 1676, t. IV, p. 440, édit. G.). Mais elles étaient, lorsque madame de Grignan les vit, trop jeunes et trop petites pour qu'il fût question de leur beauté; et la lettre de madame de Sévigné au comte de Guitaud, publiée pour la première fois dans l'édition de M. Gault de Saint-Germain (lettre 1693, t. X, p. 445, édit. G.), qui nous apprend que madame de Valence a été au couvent de la Visitation, explique celle qu'elle avait écrite précédemment, et ne laisse aucun doute sur l'exactitude de l'édition de la Haye. La preuve que les éditeurs ont altéré le texte de cette lettre en voulant la corriger se tire encore du passage qui suit immédiatement, où madame de Sévigné dit à sa fille (t. I, p. 20): «Personne n'écrit mieux que vous; ne quittez jamais le naturel, votre tour s'y est formé, et cela surpasse un style parfait.» Tous les éditeurs subséquents ont substitué (t. I, p. 332): «Vous écrivez entièrement bien, personne n'écrit mieux; ne quittez jamais le naturel, votre tour s'y est formé, et cela compose un style parfait.» Indépendamment du pléonasme dans les deux premiers membres de phrase, qui n'était pas dans madame de Sévigné, en mettant le mot compose à la place du mot surpasse on a fait disparaître une expression énergique et piquante pour y substituer une expression impropre et plate; et de plus, en croyant rendre la pensée plus logique, on l'a dénaturée, et on lui a ôté tout ce qu'elle a d'original et de profond. L'intention de madame de Sévigné est de faire distinguer ici l'écrivain du grammairien, le talent d'écrire d'avec l'art d'écrire. Le naturel dans le style, c'est la grâce:

 
Et la grâce, plus belle encor que la beauté,
 

dit la Fontaine quand il veut donner une idée des séduisants attraits de Vénus. C'est la même pensée que celle de madame de Sévigné, exprimée d'une manière analogue. Je dois dire que le savant et exact éditeur des Lettres de madame de Sévigné n'a pu ni rectifier ce texte ni éviter cette méprise, puisqu'il n'avait pu se procurer l'édition de la Haye, 1726, lorsqu'il fit la sienne; et que la publication de la lettre de madame de Sévigné au comte de Guitaud, qui fait mention de madame de Valence, est bien postérieure à celle de son édition. Voyez Lettres DE SÉVIGNÉ, édit. de Monmerqué, in-8o, t. I, p. 48.

Page 329, lignes 4-7: Une relation admirable, selon elle, adressée à M. de Coulanges par M. de Ripert, homme d'affaires de M. de Grignan.

Voici le texte de l'édition de la Haye:

«M. de Coulanges vient de m'apporter une relation admirable de tout votre voyage, que lui fait très-agréablement M. Ripert; voilà justement ce que nous souhaitons (p. 38).» … «M. le marquis de Saint-Andiol m'est venu voir; je lui ai montré la relation de Ripert, dont il a été ravi pour l'honneur de la Provence… J'attends celle de Corbinelli (p. 39).»

On peut voir aux endroits cités de l'Histoire de Sévigné, par M. Aubenas, et surtout dans la note, p. 588, qui termine l'ouvrage de cet auteur, quelles sont les prétentions de la famille de Ripert. Du temps de madame de Sévigné, il y avait au moins quatre frères de ce nom; car, dans la lettre du 6 septembre 1676, t. V, p. 113, de l'édition de G. de S.-G., madame de Sévigné dit: «Mon fils me mande que les frères Ripert ont fait des prodiges de valeur à la défense de Maestricht; j'en fais mes compliments au doyen et à Ripert.» Ce doyen était le Ripert du chapitre de Grignan, et le dernier mentionné celui qui était attaché à M. de Grignan comme homme d'affaires.

Des deux lettres du 18 mars 1671 des éditions modernes, il n'y en a qu'une dans l'édition de la Haye; et dans les éditions modernes il y a beaucoup de suppressions, qui portent principalement sur les noms propres. Ainsi ces mots, «Bandol vous est d'un grand secours,» p. 34, ont été supprimés. Suppression ensuite d'un long paragraphe important, qui remplit la page 35; puis, page 36, le nom de Sessac, donné intégralement, remplacé par S***. Tout le paragraphe 37 de madame de Janson supprimé; page 39, le passage sur d'Harouys supprimé.

CHAPITRE XVIII

Page 359, lignes 29 et 30, note 1: 20 septembre, Lettres de madame RABUTIN-CHANTAL; la Haye, 1726, 20 septembre 1671.

Toute la première page de cette lettre ne se trouve que dans l'édition de la Haye, et a été supprimée dans toutes les autres.

Page 371, lignes 16 et 17: Molière lui lira samedi Trissotin.

On a écrit (voyez TASCHEREAU, Histoire de Molière, 3e édit., 1844, grand in-12, p. 256) que, lors des premières représentations des Femmes savantes, le personnage de Trissotin portait le nom de Tricotin, pour que la satire contre l'abbé Cotin, dont ce rôle était l'objet, en pût ressortir sans aucun détour. Mais la lettre de madame de Sévigné semble être contraire à cette assertion peu vraisemblable, puisqu'elle désigne ce rôle, et par ce rôle toute la pièce, par le nom de Trissotin, qui est le seul qu'on trouve dans la pièce imprimée. Les Femmes savantes furent jouées le 11 mars 1672 (TASCHEREAU, Histoire de Molière, 3e édition, p. 169). La lettre de madame de Sévigné est datée du mercredi 9 mars, c'est-à-dire de deux jours antérieure à la représentation, qui eut lieu le vendredi: ainsi dès lors le rôle portait le nom de Trissotin. La lecture de cette pièce par Molière, annoncée dans la lettre de madame de Sévigné pour le samedi 12 mars, n'eut probablement pas lieu, puisque le jour fixé au samedi était le lendemain même de la représentation. Cette pièce fut achevée d'imprimer le 10 décembre 1672, comme nous l'apprend le catalogue de la Bibliothèque dramatique de M. de Soleinne, no 1296, p. 298. La mention de cette édition manque dans la bibliographie de Molière, de M. Taschereau.

 

Page 378, ligne 7: Pour laisser écrire dans ses lettres.

Surtout par Corbinelli. Des lettres de Corbinelli à Bussy, qui se trouvent dans la correspondance de ce dernier, il n'y en a qu'un petit nombre qui portent le nom de Corbinelli; il y en a beaucoup qui n'ont que l'initiale du nom C***; enfin il y en a sans initiale. Un lecteur familiarisé à la lecture des auteurs de ce siècle les reconnaît facilement. Toutes sont très-mal rangées, ainsi que toute cette intéressante correspondance, qui mériterait bien de trouver un éditeur savant et intelligent.

CHAPITRE XIX

Page 387, ligne 12: Ce fut une grande joie pour madame de Sévigné lorsque de Pomponne…

Nous apprenons par le Portefeuille de Dangeau, manuscrit de la Bibliothèque du Roi, A, 253, que de Pomponne fut nommé secrétaire d'État, en remplacement de M. de Lyonne, le 10 septembre, et qu'il prêta serment le 12 septembre; la lettre de madame de Sévigné, qui donne cette nouvelle à sa fille, est datée du 13 septembre. Il ne faut pas confondre les Portefeuilles de Dangeau que nous citons ici et que nous citerons peut-être encore avec le Journal de Dangeau; c'est tout autre chose.

Page 396, ligne 4: Les lettres les plus remarquables qu'elle ait écrites.

Deux de ces lettres étaient ainsi désignées, la lettre sur le cheval et celle sur la prairie. Cette dernière est, comme on l'a très-bien remarqué, celle qui est relative au renvoi de Picard (du 22 juillet 1671) et où madame de Sévigné explique si agréablement à son cousin de Coulanges, tout à fait étranger, comme un vrai citadin, aux travaux ruraux, en quoi consiste l'opération du fanage.

Page 396, ligne 9: Elle gardait soigneusement les lettres du spirituel chansonnier.

«Ce petit Coulanges vaut trop d'argent; je garde toutes ses lettres.» (SÉVIGNÉ, Lettre du 29 janvier 1685, t. VII, p. 229, édit. de M.)

Page 397, lignes 7 et 8: Elle avait dix ans moins que lui.

Philippe-Manuel de Coulanges était né à Paris vers 1631, Marie-Angélique Dugué en 1641. Elle se maria le 16 décembre 1659, et n'avait alors que dix-sept ans et quelques mois.

Page 399, lignes 16 et 17: Auxquels s'applique plus particulièrement le nom d'esprit.

Comme, par exemple, lorsqu'elle dit du duc de Villeroi, qui était amoureux d'une femme nullement éprise de lui: «Il est plus charmé qu'il n'est charmant.» Ce dernier mot, ainsi placé, est à la fois verbe et adjectif et applicable au duc dans sa double et maligne signification. (Voyez la lettre du 24 février 1673.)

Page 399, lignes 21 et 22: Son écriture et son orthographe ne répondaient pas à l'élégance de son style.

Coulanges a inséré ces mots dans une lettre de sa femme à madame de Grignan:

«Je viens de prendre la liberté de lire tout ce que madame de Coulanges vous écrit; c'est grand dommage que ce ne soit une meilleure écriture et une meilleure orthographe; son style assurément le mériterait bien, convenez-en, madame; mais il ne faut pas espérer qu'elle s'en corrige. Tout ce qui est à souhaiter, c'est que vous puissiez lire ce qu'elle vous mande.» (Lettre de madame de Coulanges à madame de Grignan, 7 juillet 1703, t. XI, p. 398.)

Page 401, lignes 3 et 4: Madame de Sévigné se plut toujours dans la société de la femme de son cousin.

Madame de Sévigné ne voulait pas que son cousin quittât la rue du Parc-Royal pour aller demeurer au Temple, parce que cela éloignait d'elle madame de Coulanges. «Au lieu de trouver, comme je faisais, cette jolie madame de Coulanges sous ma main, prendre du café avec elle, y courir après la messe, y revenir le soir comme chez soi; enfin, mon pauvre cousin, ne m'en parlez pas: je suis trop heureuse d'avoir quelques mois pour m'accoutumer à ce bizarre dérangement.» (Lettre du 1er décembre 1690, t. IX, p. 427.)

CHAPITRE XX

Page 415, lignes 23 et 24: SOLI DEO HONOR ET GLORIA.

Cette inscription, qui est tirée du texte de l'épître de saint Paul aux Romains, a donné lieu au continuateur de Bayle (Chauffepié, Supplément au Dictionnaire de Bayle) de prêter à madame de Sévigné, dans l'intérêt du protestantisme, des sentiments contraires à l'invocation des saints, que ses lettres démentent en un grand nombre d'endroits.

Page 416, ligne 26: Racine passera comme le café.

L'usage du café n'ayant été introduit en France que vers l'an 1669, il en résulte que les premiers chefs-d'œuvre de Racine lui sont antérieurs; Andromaque date de 1669, les Plaideurs de 1668, Britannicus de 1669, Bajazet de 1672. Le premier traité, je crois, publié sur le café, en français, est celui qui est intitulé De l'usage du caphé, du thé, et chocolate (sic); Lyon, chez Girin, 1671, in-8o. Il est traduit du latin, et il est dit, page 30, «que la plupart de ceux qui usent du café y sont réduits par nécessité, et le prennent plutôt comme un médicament que comme un régal.» Il en était de même du thé et du chocolat. Mais dix ans plus tard il se faisait de toutes ces substances, et surtout du café, une très-grande consommation à Londres et à Paris, «non-seulement, dit de Blégny, chez les marchands de liqueurs, mais encore dans les maisons particulières et dans les communautés.» Du bon usage du thé, du café et du chocolat, pour la préservation et la guérison des maladies, par M. de Blégny; Paris, 1687, in-12, p. 96 et 166. De Blégny, d'après Bernier, dit que dans l'Inde et la Perse on use très-peu de café, et seulement dans les ports de mer; mais que par toute la Turquie on en fait un fort grand usage. «Peu s'en faut, ajoute de Blégny, que les Anglais et les Hollandais ne suivent l'exemple des Turcs, et peu s'en faut aussi que nous ne soyons aussi avancés que ceux-là sur cette habitude; mais en revanche les Espagnols, les Italiens et les Flamands ne s'y portent pas volontiers.» (P. 166.) Bien loin de dénigrer le café, et surtout le café au lait, madame de Sévigné fut une des premières à en prendre, et elle en recommandait l'usage à sa fille. (SÉVIGNÉ, Lettres, 19 février 1690, t. X, p. 263, édit. de G.)

SUPPLÉMENT
AUX NOTES ET ÉCLAIRCISSEMENTS DE LA PREMIÈRE PARTIE

En développant dans la première et la seconde partie de cet ouvrage la politique de Mazarin, j'ai souvent eu occasion de citer des lettres autographes de Mazarin, de Colbert et de Louis XIV902, qui appartiennent à la Bibliothèque royale. Des fragments de ces lettres avaient déjà été imprimés, mais très-incorrectement, par Soulavie, dans les Œuvres de Saint-Simon. Elles ont été très-bien publiées dans les Documents historiques sur l'histoire de France, par M. Champollion-Figeac, qui me les avait indiquées. Mais j'ai cité à la page 215 de la première partie une lettre autographe d'Anne d'Autriche au cardinal Mazarin, que je ne trouve point dans le recueil de M. Champollion-Figeac. Cette lettre n'a point été publiée ailleurs, et il est intéressant de la faire connaître, parce qu'elle vient à l'appui de ce que j'ai dit du refroidissement d'Anne d'Autriche pour le cardinal Mazarin, lorsque celui-ci, afin de conserver le pouvoir, se fit un appui du jeune roi, dont il avait capté toute la confiance, contre la reine sa mère, ou plutôt contre les intrigues des personnes qui l'entouraient.

LETTRE D'ANNE D'AUTRICHE AU CARDINAL MAZARIN

«A Saintes, ce 30 juin 1660.

«Vostre letre ma donnee une grande joye je ne say si je seray asses heureuse pour que vous le croies et que si eusse creu qune de mes letres vous eust autant pleut j'en aurays escrit de bon cœur et il est vray que den voir tant et des transports avec lon les recent et je les voyes lire me fesoit fort souvenir d'un autre tant903 don je me souviens presque a tout momants quoy que vous en puissiez croire et douter je vous asseure que tous ceux de ma vie seront enploies à vous tesmoigner que jamais il ni a euee damitie plus veritable que la mienne et si vous ne le croies pas jespere de la justice que jay que vous vous repâtires904 quelque jour den avoir jamais douté et si je vous pouves aussi bien faire voir mon cœur que ce que je vous dis sur ce papier je suis asseurée que vous series contant, ou vous series le plus ingrat homme du monde et je ne croie pas que cela soiet. La Reyne905 qui escrit eicy sur ma table me dit de vous dire que ce que vous me mandes du confidant906 ne lui déplait pas et que je vous asseure de son affession, mon fils907 vous remercie aussi et 22908 me prie de vous dire que jusques au dernier soupir quoique vous en croies .

«Et au dos est escrit: A Monsieur le Cardinal

La lettre était fermée par une petite faveur rouge, scellée des deux côtés du cachet d'Anne d'Autriche, et dont les bouts subsistent encore, ainsi que les cachets. Cette lettre, ployée, n'a que la grandeur d'un billet.

Cette lettre a été écrite lorsque Louis XIV, après son mariage, revint avec toute la cour, de Saint-Jean-de-Luz à Paris. D'après les nombreuses relations de ce voyage, le 23 juin on était à Bordeaux, le 27 à Blaye. «Le 29, dit Colletet dans sa relation (pag. 5), les reines partirent pour Saintes,» où elles arrivèrent le 30; c'est de là et de ce jour qu'est datée la lettre. Le roi s'était écarté, et avait été au Brouage avec le cardinal, qui rejoignit les reines le lendemain à Saint-Jean-d'Angely.

902Voyez IIe partie, p. 155, 161, 229.
903Temps.
904Repentirez.
905La jeune reine, la femme de Louis XIV.
906Le confident, c'est le roi. Voyez les Lettres inédites de MAZARIN; publiées par M. Ravenel.
907Philippe de France, le frère de Louis XIV.
908Le numéro 22 est, dit-on, la reine elle-même; et aux conjecture que ces remplacent les mots par lesquels elle était convenue d'exprimer sa tendresse pour Mazarin. Voyez la clef dans les Lettres inédites de MAZARIN, publiées par M. Ravenel, 1836, in-8o, p. 491.