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Les poésies de Sapho de Lesbos

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Sappho

Les poésies de Sapho de Lesbos

A MADAME A. DE SAINT-REMY



A la muse de Mitylène

Qui ne sourirait en ce jour?

C'est une adorable sirène,

    Digne de votre amour.





Sapho n'est plus cette insensée

Qui, sans espoir, fuyant Lesbos,

Pour guérir son âme blessée

    Se jette dans les flots.





Et son portrait, indigne fable,

Est l'œuvre d'un esprit jaloux;

Cœur sans fard, elle était aimable

    Et belle comme vous.





Sur elle en vain la calomnie

Verse ses poisons odieux;

C'est une femme de génie,

    Et la fille des dieux!





Fier, un grand peuple, dans l'ivresse,

L'élève au rang des immortels,

Et l'encens, dans toute la Grèce,

    Brûle sur ses autels.





Elle aima d'un amour sublime,

Elle aima comme un noble cœur;

Aimer ainsi, loin d'être un crime,

    Pour elle est un honneur.





Seule, l'amitié vive et tendre

Exalta son âme de feu…

Faut-il, hélas! pour la comprendre,

    Être inspiré d'un dieu?





Ah! si Sapho, brisant sa chaîne,

Revenait du séjour des morts,

Sa lyre, pour vous, de la Seine

    Viendrait charmer les bords.





Mais, changeant la corde amoureuse

Qui vibrait jadis pour Vénus,

Combien elle serait heureuse

    De chanter vos vertus!





Sapho, la gloire de la Grèce,

A vos pieds dépose ces fleurs…

Des divinités du Permesse

    Les Grâces sont les sœurs.



PRÉFACE

Je dirai peu de mots sur la vie de Sapho. Elle naquit à Mitylène, dans l'île de Lesbos, et vécut dans le sixième siècle avant l'ère vulgaire. Je ne rechercherai point quels furent ses parents. A toutes les destinées des grands noms de l'antiquité, il se mêle toujours quelque événement merveilleux, le plus souvent absurde ou ridicule; nous sommes dans un siècle un peu plus positif.



Sapho n'a point échappé à la loi fatale. Comme si ce n'était pas assez d'être un grand poëte, un génie sublime, certains esprits semblent avoir pris à tâche de rapetisser une si belle gloire en faisant des suppositions fantastiques, qui n'ont pas même la vraisemblance pour excuse.



Nous sommes en droit de repousser toutes ces anecdotes d'une vie ignorée, comme autant de récits controuvés; ce que l'un affirme, l'autre le dément. Ce qu'il y a de certain, c'est que les écrivains contemporains de Sapho ne nous ont transmis, sur les circonstances de sa vie, rien de positif qui puisse nous servir de guide.



Tout ce qui a été recueilli de ce génie nous vient d'auteurs bien postérieurs, qui n'indiquent nullement les sources où ils ont puisé. Nous pouvons donc ne pas ajouter une foi aveugle à tout ce que disent sur Sapho Horace et Ovide, qui peuvent faire autorité assurément en fait de goût, mais dont il est permis de contester les allégations un peu hasardées.



Ainsi je passerai sous silence l'opinion d'une passion monstrueuse qui lui a été calomnieusement imputée par des esprits assez mal faits pour ne pas comprendre toute l'exaltation d'un cœur aimant. L'amitié, dans ses transports, peut aussi devenir une passion, surtout dans une âme de poëte.



Comment accorder cette passion désordonnée avec l'amour insensé pour Phaon? Il faut êt