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La chasse à l'oppossum

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Cependant, le sauvage qui s'est sauvé au début de l'opération, revient suivi d'une vingtaine d'individus, hommes, femmes et enfants; deux d'entre eux portent des tisons embrasés. Sans même faire attention à nous, ils rassemblent des branches sèches et allument un grand feu à quelques mètres de l'arbre qu'attaquent toujours les haches des deux chasseurs.

Après un travail d'une heure environ, l'écorce est percée et laisse voir un trou béant, suffisamment large pour y passer le bras. Un des indigènes plonge la main dans la cavité; des cris aigus se font entendre; les opossums, car ils sont là toute une famille, sont percés de coups de couteaux et l'un après l'autre, huit cadavres sont sortis du trou. A mesure qu'ils arrivent à terre, un indigène les saisit par la queue, les balance un instant et les envoie au milieu du brasier allumé par les femmes; après une cuisson sommaire, ils les retirent carbonisés et les mangent en les déchirant à belles dents; ce repas est écoeurant à voir.

– Il me semble qu'en voilà assez, dis-je à Robert; si nous partions!..

– Et le boomerang! me répond-il.

Dick reprend alors son rôle d'interprète, et invite trois des hommes à nous suivre à notre camp pour recevoir les opossums promis, puis, escortés des indigènes, nous reprenons la direction du bivouac.

Chemin faisant, je demande à Robert l'histoire de Dick et du boomerang.

– Quand tu auras vu avec quelle adresse ces sauvages se servent de cet instrument.

Arrivé au camp, Robert donna les trois opossums, et en promit trois autres aux indigènes, s'ils voulaient nous donner un spécimen de leur habileté à manier cette arme; ils acceptèrent.

Nous partîmes donc à leur suite à la recherche d'un but quelconque.

Celui qui paraissait le plus vigoureux des trois sauvages avait à peine fait cent pas qu'il s'arrêta, et nous fit signe de l'imiter. Puis du doigt il nous montra une bande de ces gros perroquets, nommés cacatoès, qui voletaient au sommet d'un arbre haut de plus de quarante pieds. L'homme, prenant le morceau de bois passé à sa ceinture que j'avais déjà remarqué, s'avança doucement jusqu'à vingt mètres de l'arbre environ, lança son instrument, suivant une ligne horizontale, à deux pieds du sol. L'arme parcourut ainsi un espace de quinze à dix-huit mètres; puis soudain, ayant touché la terre, elle se releva par un angle droit, monta jusqu'au sommet de l'arbre, abattit deux cacatoès et, décrivant une parabole, vint retomber aux pieds de l'homme.

J'avoue que mon premier mouvement fut de me frotter les yeux pour savoir si j'étais bien éveillé; ensuite je ramassai le boomerang pour voir s'il ne contenait pas quelque mystérieux mécanisme chargé de régler sa marche, mais rien.

Je n'avais dans les mains qu'un simple morceau de bois, dur et compact, quoique flexible, et légèrement courbé au milieu; sa longueur était de deux pieds cinq pouces (65 centimètres), sa largeur de deux pouces (6 cent.), et son épaisseur de deux centimètres; un des bouts est renflé et arrondi; l'autre, au contraire, est tout à fait plat.

Afin de bien me rendre compte du mouvement du boomerang, je priai l'indigène de le lancer de nouveau, n'importe où, sans but.

L'homme saisit l'arme à pleine main par le gros bout, la partie convexe en dehors, puis, la faisant tourner au-dessus de sa tête, la lança de toute sa force devant lui.

Toutefois, au moment de la laisser échapper, il lui, imprima, avec le poignet, un mouvement rapide de rotation.

Le boomerang partit, et, comme la première fois, après avoir touché terre, remonta en ligne droite, avec une vitesse et une précision surnaturelles, et revint alors vers celui qui l'avait lancé.

Je voulus acheter un boomerang mais les indigènes refusèrent absolument de m'en vendre.

Le soir, en attendant l'heure de faire une seconde nuit de chasse à l'opossum, où j'espérais être plus heureux que la première fois, Robert me raconta l'histoire de Dick.

– Ce brave garçon, me dit-il, avait plusieurs fois vu les naturels se servir du boomerang; mais il ne pouvait croire qu'avec ce morceau de bois, des «sauvages» fussent capables d'atteindre un but aussi bien que lui avec sa balle. Il les défia donc et fut toujours vaincu.

«Un jour, cependant, un indigène lui dit, que si lui, Dick, voulait aller se placer à dix mètres derrière lui, il lancerait le boomerang en avant, atteindrait un but déterminé, et qu'en revenant, il irait frapper Dick en pleine poitrine.

«Mon vieux bushman rit beaucoup de la prétention du «sauvage» et accepta résolument sa proposition. Debout, à quelques pas, en arrière, les bras croisés sur la poitrine, avec la tranquillité d'un homme sûr de son fait, il attendit… pas longtemps.

«Le sauvage prit d'un coup d'oeil ses mesures, lança son boomerang, et le morceau de bois, après avoir touché le but désigné, revint avec une telle vélocité, un tel bruit sinistre que mon pauvre Dick serait sorti de cette expérience fêlé de tous les côtés et la poitrine brisée, s'il ne se fût vivement et prudemment jeté le nez dans le gazon.

«Il ne demanda pas son reste, mais, jamais il n'a pardonné aux «sauvages» leur adresse au boomerang.

– Cet instrument possède une force prodigieuse.

– Oui, mon ami; quand il est lancé par une main habile, on est stupéfié par les effets foudroyants de ce simple morceau de bois qui, sous l'impulsion d'une force initiale minime, accélère de lui-même sa vélocité, brise comme verre la jambe d'un vigoureux cheval, jette son homme sur le carreau, ou, s'élevant perpendiculairement selon l'intention du chasseur, frappe d'estoc et de taille, de ricochet en ricochet, tout ce qui se trouve sur sa route.