Zero Maladie

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Zero Maladie
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Angelo Barbato

ZÉRO MALADIE

Titre original: Malattia zero

Traduit par: Magali Vidrequin

Éditeur: Tektime

ZÉRO MALADIE

La naissance du modèle collaboratif (Communaux) de santé.

La naissance des réseaux numériques pour la santé (Health Smart Grid Digital).

Auteur: Angelo Barbato MD angelo.barbato@gmail.com

Médecin spécialiste en hygiène et en médecine préventive et en cours de spécialisation en cardiologie. Expert en santé publique et privée. Il a travaillé dans la gestion sanitaire de plusieurs organismes sanitaires italiens, militaires ou civils, occupant des postes cliniques, d’administration de prévention sanitaire, d’entreprise, de gestion des données et de gestion informatique. Coordinateur de la réunion technique « Malattia Zero e Salute Sostenibile » du CETRI-TIRES, Cercle européen de la troisième révolution industrielle – Third Industrial Revolution European Society, qui s’inspire des idées économiques de Jeremy Rifkin.

Sommaire

Presentation 1

Contributions 3

Préface d’Angelo Consoli – Les communautés de la santé 5

1. La gestion du bien-être et de la santé dans le cadre idéologique de Jeremy Rifkin 11

2. L’évolution historique du système de santé 27

2.1 D’Hippocrate à la découverte des antibiotiques 27

2.2 Les systèmes de santé : publique (welfare state e Beveridge) et privé (Bismark) 33

2.3 La métaphore du pendule 51

2.4 Un nouveau modèle à l’horizon : le communal de la santé 55

3. La médecine proactive sur le territoire : prévention et chronicité 61

4. Le malade grave et le service des urgences 67

5. La prévention 73

5.1 Introduction 73

5.2 Les déterminants de santé 77

5.3 Les déterminants socio-économiques et l’intégration sanitaire et sociale 83

5.4 Les modes de vie 87

5.5 L’activité physique 89

5.6 La prévention des pathologies chroniques et dégénératives grâce aux habitudes alimentaires 97

5.7 Risques cardiovasculaires et risques de cancer 117

5.8 Le risque psychiatrique 121

5.9 Le risque génétique 123

5.10 Risque dentaire et zéro carie 129

6. Le paradigme de la communication et docteur Google 135

7. Les nouvelles frontières de la communication en matière de santé 143

7.1 Technologie portable et bracelets connectés 143

7.2 La télémédecine 151

8. Les soins de santé axés sur le patient 153

9. La démocratisation de la santé 161

10. Les nouveaux soins communautaires en Italie dans le secteur public 167

11. Les technologies numériques dans le domaine de la chirurgie 191

12. Le nouveau paradigme des soins de santé : le modèle collaboratif et le financement participatif 195

13. Objectifs et indices de Zéro Maladie 201

1 4 . Des 3 paradigmes de Rifkin aux 3 paradigmes de Zéro maladie 207

Presentation

Ce livre repose sur la volonté des auteurs de diffuser les outils et les modèles de transformation du système de santé basés sur la théorie « Zero Marginal Cost » de Jeremy Rifkin.

Cette tentative ambitieuse de rendre disponible et utilisable un modèle collaboratif pour la santé, pour les maladies et les soins, répond à la nécessité de l’être humain de retrouver un lien avec lui-même et avec le monde qui l’entoure. Les politiques environnementales, économiques, sociales et technologiques devront être axées sur la protection de l’homme et de son environnement. Les inévitables répercussions sur la santé pourront être de plus en plus évitées grâce au nouveau paradigme de la communication, grâce à des choix responsables et au soutien essentiel d'Internet. Le passage d’une médecine hiérarchique structurée à une médecine intégrée et développée, intègre l’être humain dans le rôle de responsable de lui-même, et la communauté axée sur la santé comme point d’arrivée, et non plus seulement comme un point de départ ni comme un devoir social bien avant d’être un droit fondamental.

Un élan visionnaire, probablement, mais, pour reprendre les mots de notre référence intellectuelle, « It’s already happening ».

Contributions

Je remercie les professionnels suivants pour leur contribution :

 Bruno Corda, MD

Médecin, spécialisé en médecine d’urgence, en hygiène et en médecine préventive. Déjà médecin généraliste, directeur du département de médecine préventive, directeur du service d’hygiène et de santé publique. Président de la Société italienne d’hygiène de la région Latium. Diplômé d’un Master CORGESAN et EMMAS en gestion de la santé. Réunion technique « Malattia Zero e Salute Sostenibile » du CETRI-TIRES, Cercle européen de la troisième révolution industrielle – Third Industrial Revolution European Society, qui s’inspire des idées économiques de Jeremy Rifkin. bruno_corda@alice.it

Je voudrais tout spécialement remercier Bruno Corda pour m’avoir initié aux pensées de Jeremy Rifkin.

Angelo Barbato

 Angela Meggiolaro, MD

Médecin en cours de spécialisation dans le département d’hygiène et des maladies infectieuses de la Sapienza, université de Rome. Expériences dans le domaine de l’épidémiologie et de l’économie de la santé. Auteur de manuels et de publications scientifiques dans le domaine de la santé publique et de la médecine du territoire. Réunion technique « Malattia Zero e Salute Sostenibile » du CETRI-TIRES, Cercle européen de la troisième révolution industrielle – Third Industrial Revolution European Society, qui s’inspire des idées économiques de Jeremy Rifkin. angela.meggiolaro@gmail.com

 Angelo Consoli

Directeur du Bureau européen Jeremy Rifkin

Président du CETRI-TIRES (Cercle européen de la troisième révolution industrielle)

Coauteur avec Livio de Santoli du livre « Territorio Zero »

 Francesca Mirabelli, MD PhD

Cardiologue ASL Roma 1 francesca.mirabelli78@gmail.com

 Alessandro Anselmo, MD

Spécialiste en chirurgie générale

Ph.D en Physiopatologie chirurgicale

Ph.D en transplantation d’organes

Master de deuxième cycle en transplantation d’organes

Fellow European Board of Surgery

Médecin cadre – UOC (Unité opérationnelle de chirurgie de transplantation) – Fondation PTV - Rome

 Antonio Magi

Médecin chirurgien spécialisé en radiologie

 

Directeur médical District IV ASL Rome

 Roberto Del Gaudio

Préparateur physique Master de 3ème cycle FIPE CONI et juriste roberto.del.gaudio2@gmail.com

 Antonina Fazio

Biologiste nutritionniste spécialisée en pathologie clinique afazio2002@hotmail.com

 Eloisa Fioravanti

Diplômée en lettres et en médecine bucco-dentaire fioravelo@gmail.com

Préface d’Angelo Consoli – Les communautés de la santé

La Troisième révolution industrielle ne représente pas seulement le passage d’un modèle énergétique/économique centralisé et hiérarchisé vers un modèle collaboratif et interactif.

La troisième révolution industrielle est également, et surtout, un changement paradigmatique pour le genre humain.

Un passage révolutionnaire d’un style de vie individualiste et intéressé à un style de vie biosphérique et empathique. Dans une société où le coût marginal de la production et de la distribution des biens et des services s’approche de plus en plus de zéro, où les informations, les objets, les idées, les services et les personnes voyagent à des prix infiniment petits (si l’on prend comme référence le siècle dernier) et dans des délais alors inimaginables, le genre humain sort d’une économie de pénurie et entre définitivement dans une économie durable de par l’abondance avec laquelle l’activité économique se développera non plus selon les codes et les normes de l’économie de marché traditionnelle basée sur le profit, mais selon les codes et les normes d’une économie sociale basée sur les communaux collaboratifs.

Jeremy Rifkin décrit avec beaucoup de lucidité le communal de l’énergie, composé de millions de proconsommateurs (à la fois producteurs et consommateurs) capables de générer presque la totalité de leur énergie verte à un coût marginal proche de zéro, le communal de la logistique capable de concevoir, d’imprimer et de distribuer des biens et des services à des coûts marginaux presque nuls, et les communaux de la santé, de l’éducation et de la culture capables de garantir des services scolaires, sanitaires et culturels dans les mêmes conditions, ou bien encore le communal de la mobilité pour le déplacement des Hommes d’une manière de plus en plus durable, efficace et économique.

Les nouvelles générations sont projetées au-delà du marché capitaliste, au-delà d’un modèle centralisé, hiérarchique, fermé, patriarcal, lié à la propriété, ils sont projetés vers un modèle collaboratif, ouvert, transparent, égalitaire et empathique.

C’est ce que Rifkin appelle le pouvoir latéral, « Lateral Power ».

Les jeunes d’aujourd’hui, reliés entre eux dans l’espace virtuel (par les réseaux sociaux au sein desquels les informations circulent abondamment et gratuitement) et physique (avec les vols low-cost inimaginables il y a seulement dix ans, ou par les réseaux urbains de plus en plus rapides et efficaces), « ils se débarrassent peu à peu des restes des contraintes idéologiques culturelles et commerciales qui, depuis des temps immémoriaux, séparent le “ moi ” du “ toi ”, dans le cadre d’un système capitaliste caractérisé par des rapports de propriété privée, d’échanges commerciaux et de frontières nationales. L’“ Open Source ” est devenu le mantra d’une génération qui voit les rapports de pouvoir d’une manière complètement différente par rapport à ses parents et à ses grands-parents qui ont vécu dans un monde dominé par la géopolitique » (cit. Jeremy Rifkin, La nouvelle société du coût marginal zéro, pag. 429-430).

Dans une nouvelle civilisation empathique profondément intégrée dans la communauté de la biosphère, toutes les ressources naturelles font alors partie d’un patrimoine commun et leur conservation devient la préoccupation de tous.

L’aménagement des espaces urbains, industriels ou ruraux ne peut se soustraire à cette règle.

La construction des grandes installations industrielles et des réseaux d’infrastructures du troisième millénaire et de la troisième révolution industrielle ne peut donc plus avoir lieu selon les normes de gaspillage et de non durabilité de l’ère fossile durant laquelle les réseaux étaient construits au mépris des principes d’efficacité et d’optimisation des espaces urbains et ruraux éventrés, sauvagement et de façon répétée, pour construire des dizaines de milliers de lignes de transport d’énergie électrique, de gazoducs, d’aqueducs, de canalisations, de réseaux routiers, de réseaux électromagnétiques et des réseaux d’éclairage.

Dans l’idée du communal collaboratif, l'Internet des objets offres des possibilités nouvelles et inédites de « faire plus avec moins » (principe de l’efficacité énergétique affirmée par l’Union européenne) de par l’exploitation des infrastructures existantes en les enrichissant de nouvelles fonctions utiles pour l’expansion de l’économie de partage et de l’empathie entre les hommes.

Le communal collaboratif se base sur l’idée que les lois de la thermodynamique ne peuvent être ni ignorées, ni limitées, ni contournées, ni violées. La première loi de la thermodynamique nous montre clairement que rien ne se crée, rien ne se détruit, mais tout se transforme. Ainsi, la combustion d’un objet pour fermer le cycle des déchets ne signifie pas du tout qu’il ait été éliminé ou que l’on s’en soit libéré, mais simplement que l’on a réalisé un changement en passant d’un état solide à un état gazeux ce qui le rend d’autant plus dangereux, non seulement pour l’environnement mais également pour la santé humaine. La totalité de l’énergie de la deuxième révolution industrielle se base sur la violation des lois de la thermodynamique. L’utilisation de la combustion pour la propulsion des turbines est une folie thermodynamique et entraîne des conséquences létales pour la santé humaine. Changer de paradigme en passant d’un cycle fossile à un cycle solaire implique donc l’activation d’une économie produisant moins de risques pour la santé humaine, et donc plus conforme à une politique de prévention des maladies, plus proche de l’objectif zéro maladie.

La troisième révolution industrielle est en train de créer une société plus saine et plus propre, une agriculture sans pesticides et sans organismes génétiquement modifiés (OGM), un industrie collaborative et non plus centralisée à émissions réduites. Au contraire, la poursuite des logiques verticales entraînera inévitablement une pollution de la santé provoquée par la contamination de la terre, de l’eau et des décharges ainsi que par l’intoxication de l’air par les incinérateurs.

Mais Rifkin, avec son nouveau livre, progresse dans la réflexion en développant également les correspondances entre l’environnement et la santé, et nous éclaire sur la manière dont change la relation médecin/patient dans une dynamique de nouvelle communauté collaborative de la santé. Rifkin arrive également à ses résultats considérables en décrivant le « communal de la santé ».

En effet, pourquoi ne pourrions-nous pas imaginer, de la même manière que le communal de l’information ou que le communal de l’énergie, un communal de la Santé ? Un communal dans lequel les technologies modernes de l’information collaborative et interactive permettent au Dr. Gille Frydman, fondateur de l’ACOR (Association of Cancer Online resources, Association des ressources en ligne sur le cancer) de développer un modèle de médecine participative, au sein duquel, dans un unique communal, convergent des acteurs différents : des patients, des chercheurs, des médecins, des financeurs, des producteurs de matériel médical, des thérapeutes, des sociétés pharmaceutiques et des soignants, tous engagés dans cette collaboration pour améliorer les soins (Rifkin, La nouvelle société du coût marginal zéro, p. 363).

Il ne s’agit pas d’une hypothèse lointaine ni illusoire. Patientslikeme est un réseau social avec plus de 200 000 patients inscrits qui s’occupe de 1 800 maladies et a déjà, par exemple, dénoncé l’arnaque des médicaments à base de carbonate de lithium utilisés pour la sclérose latérale amyotrophique (SLA). Une étude basée sur les données récupérées en ligne a permis de démontrer l’inefficacité totale de ce traitement pour la SLA. Cela démontre que cette approche « open source » peut également offrir des résultats importants, supplémentaires ou complémentaires à la recherche médicale, qu’elle soit interne ou partenariale, pour laquelle les données demeurent dans une logique verticale, c’est à dire limités et confidentiels.

Il n’y a que dans le secteur de la médecine qu’il soit indispensable de disposer de données de masse, le « big data », traitées avec des algorithmes adaptés, selon le modèle du financement participatif (crowdfunding), pour identifier des modèles sanitaires à bas coûts marginaux et à efficacité élevée. Dans le chapitre « Tout le monde est médecin » de son dernier livre, Jeremy Rifkin nous rappelle qu'Internet compte aujourd’hui des centaines de communaux sanitaires Open Source. Rifkin souligne ensuite que « ce nombre va certainement augmenter considérablement dans les prochaines années, car certains pays commencent à utiliser des archives électroniques pour rationaliser les services de santé. […] Le Big Data qui sera disponible dans un futur proche aux États-Unis et dans d’autres pays va fournir un réservoir d’informations ; utilisées sur des communaux de la santé pilotés par les patients avec des garanties de respect de la vie privée, elles pourraient révolutionner la médecine » (Rifkin, Ibid, p. 366).

À cet égard, le message lancé par ce travail collectif réalisé par des médecins sensibles interprétant de manière réfléchie le message rifkinien, tels que le docteur Angela Meggiolaro, le docteur Bruno Corda et le docteur Angelo Barbato, complète la vision d’une société à zéro émission, zéro déchet et zéro kilomètre et d’une économie à coût marginal zéro.

La vision « zéro » exprimée par le livre « Territoire Zéro », écrit par moi-même et par le professeur Livio de Santoli, dans lequel, grâce à la contribution d’Angelo Barbato, nous avons pu débuter la diffusion du concept de Zéro maladie, comme un scénario dans lequel l'Internet des choses et la troisième révolution industrielle permettront de rapprocher le centre de gravité des soins vers le territoire, avec la nécessité d’augmenter la prévention comme « pilier » du modèle collaboratif de la santé dans la médecine territoriale.

Cette nouvelle vision met en évidence la manière dont le modèle traditionnel, basé sur l’hôpital, devient inefficace pour le traitement des maladies chroniques de plus en plus présentes à cause des modes de vie et de travail imposés par la deuxième révolution industrielle, et qui peuvent être diminuées en renforçant le pilier de la prévention. La télémédecine, les soins à domicile, la lutte contre les maladies chroniques, l’action des médecins du territoire auprès des écoles, des administrations publiques et, surtout, la prise en charge du patient-citadin de manière proactive, révolutionnera de plus en plus la gestion sanitaire en déplaçant le centre de gravité, de l’hôpital au territoire.

Ce nouveau modèle sanitaire de la troisième révolution industrielle révolutionnera les paradigmes actuels des soins de santé en atteignant des résultats rapides et extraordinaires, notamment grâce à la prévention. Le nouveau modèle de soins est le cœur du livre Zéro maladie, qui nous parle d’un futur possible, dont la réalisation dépend de nous tous, en partant des administrations publiques et des organismes du système de santé, sans oublier les citoyens et la force motrice de l’agrégation de ses réseaux qui nous guident de plus en plus rapidement vers un mode de vie biosphérique, empathique, collaboratif et durable, tout cela dans chaque Communauté qui s’approche peu à peu du Territoire zéro.

Angelo Consoli

Directeur du Bureau européen Jeremy Rifkin

 

Président du CETRI-TIRES (Cercle européen de la troisième révolution industrielle)

Coauteur avec Livio de Santoli du livre « Territorio Zero »

1. La gestion du bien-être et de la santé dans le cadre idéologique de Jeremy Rifkin

Bruno Corda, Angelo Barbato

Jeremy Rifkin, un des économistes les plus connus au monde, réaffirme dans ses derniers travaux1 2 qu’un nouveau système économique s’approche et remplacera le capitalisme d’aujourd’hui. Le fer de lance de cette transformation est la révolution numérique qui permet l’Internet des choses. Dans le secteur des télécommunications, l’Internet des choses (ou plutôt Internet des objets, IoT, acronyme de l’anglais Internet of Things) est un néologisme qui fait référence à l’extension d’internet au monde des objets et de la réalité 3 . L'Internet des choses est constitué d’un réseau entre l'Internet de l’énergie, l'Internet de la communication et l'Internet de la logistique.

Rifkin résume sa pensée économique dans les trois paradigmes fondamentaux (énergie, communication et logistique) en affirmant que, avec l’évolution de ces paradigmes, l’Homme devient protagoniste d’une nouvelle révolution industrielle.

La première révolution industrielle (environ 1760-1870) s’est présentée comme un processus d’évolution économique ou industrielle de la société qui, d’un système agro-artisanal-commercial, est devenue un système industriel moderne caractérisé par l’utilisation généralisée de machines fonctionnant grâce à l’énergie mécanique, et par l’utilisation de nouvelles sources d’énergie inanimée (par exemple les combustibles fossiles – machine à vapeur), tout cela favorisé par une forte composante d’innovation technologique et accompagné par des phénomènes de croissance, de développement économique et de profondes modifications socio-culturelles de même que politiques4 . Cette première révolution industrielle démarre dans l’industrie textile (coton), métallurgique (fer) et minière (houille).

La deuxième révolution industrielle (environ 1870-1970) démarre, par convention, en 1870 avec l’introduction de l’électricité, des produits chimiques et du pétrole.

La troisième révolution industrielle (à partir de 1970) fait référence aux effets de l’introduction massive de l’électronique, des télécommunications et de l’informatique dans l’industrie5 .

Au cours des dernières années, une nouvelle génération de chercheurs et de spécialistes a commencé à se rendre compte que la gestion et le contrôle centralisé du commerce cèdent le pas à une production égalitaire, collaborative et latérale, dans laquelle les échanges de droits de propriétés sur le marché deviennent moins importants que l’accès aux biens et services partagés sur les réseaux, avec une prise de conscience que la vraie valeur économique est de plus en plus comprise dans le capital social et de moins en moins dans le capital économique.

Il en résultera principalement une société plus juste basée sur le partage et la collaboration entre les citoyens, ainsi qu’un modèle économique durable notamment d’un point de vue environnemental.

Le nouveau paradigme portera à un déclin progressif du marché tel que nous le connaissons aujourd’hui et, dans le même temps, à une croissance de l’économie de partage (sharing economy) basée sur la collaboration du consommateur qui devient également producteur (proconsommateur). Il s’agit du premier nouveau modèle économique à apparaitre grâce à la naissance du capitalisme et du socialisme du début du XIXe siècle. Une économie libre et mixte se met en place, en partie capitalistique et en partie collaborative. Pour 2050, Jeremy Rifkin prévoit que le capitalisme soit encore présent, mais sans être le système économique exclusif. Les jeunes partagent déjà de nombreux choses, ils produisent et partagent leurs vidéos, leur musique et leurs informations.

Les programmes de formation en ligne ouverts et gratuits font tout cela avec des coûts marginaux proches de zéro. Si l’on produit une vidéo, le cout marginal pour la diffuser est pratiquement égal à zéro.

Nous voyons le début d’un nouveau système économique pour lequel il n’y a pas que des producteurs et des consommateurs, des propriétaires et des travailleurs, mais également des proconsommateurs, c’est-à-dire des millions de personnes qui accèdent aux plateformes de l'Internet des objets et qui peuvent produire, consommer et partager tout type de service virtuel : des informations, des connaissances et de la musique en contournant les grandes organisations du XXe siècle à un coût marginal presque égal à zéro, donc gratuitement, en grande quantité et en dehors du marché. Il s’agit bien d’une révolution.

Que se passera-t-il pour les multinationales ?

De nombreuses grandes multinationales verticales du XXe siècle ont été détruites de la même manière que dans le passé, dans le présent et que dans le futur dans l’industrie de la musique, de la vidéo, du livre et de la télévision.

Parallèlement, des milliers de nouvelles entreprises de l’économie de partage sont apparues, pas seulement Google, Facebook ou Twitter, mais des milliers d’entreprises lucratives ou non lucratives, qui construisent une économie de partage permettant aux jeunes de partager ce qu’ils créent.

Il s’agit d’un procédé assez destructif pour l’économie de marché que nous connaissons actuellement mais il s’agit seulement du début d’une révolution vers la démocratisation de la vie économique.

L’Allemagne mène cette révolution et, de la même manière, de petites nations comme le Danemark ou le Costa-Rica fonctionnent bien. L’Allemagne est à l’avant-garde pour l'Internet de l’énergie avec 27 % de l’énergie produite par le soleil ou par le vent. Cela représentera plus de 35 % d’ici 2020, et 100 % d’ici 2040. Les coûts des technologies pour la production d’énergie diminuent fortement, comme cela est arrivé dans l’industrie informatique. Un watt produit par énergie solaire coûtait 150 dollars en 1970, contre 64 centimes aujourd’hui, et le prix descendra à 35 centimes d’ici 18 mois. En Allemagne, lorsque le coût des investissements sera remboursé, le coût marginal de l’énergie produite s’approchera de zéro. Ni le soleil ni le vent n’envoient de factures aux allemands. C’est gratuit. L’Allemagne se dirige vers un système énergétique à cout marginal zéro qui portera son économie à être la plus productive et la plus efficiente au monde, avec d’énormes bénéfices pour ses entreprises et ses ménages.

La Chine a également lancé sa politique énergétique avec des investissements d’au moins 82 milliards de dollars à partir de 2015 pour numériser le réseau électronique et le rendre intelligent. Des millions de chinois pourront produire de l’énergie solaire et éolienne chez eux et la partager sur le réseau électrique national.

Dans le secteur de l’ingénierie électronique et des télécommunications, un réseau intelligent (smart grid) représente l’ensemble d’un réseau d’informations et d’un réseau de distribution électrique, de façon à permettre une gestion intelligente du réseau électrique.

Cette caractéristique « intelligente » doit être mise en avant sous différents aspects ou fonctionnalités, c’est-à-dire de manière efficace pour la distribution d’énergie électrique et pour une utilisation plus rationnelle de l’énergie tout en minimisant d’éventuelles surcharges et variations de la tension électriques autour de sa valeur nominale6 .

Le réseau numérique intelligent (smart grid digital) est le concept qui, porté par le réseau électrique, se développera de plus en plus au sein des connexions de réseau informatique. Cela ne correspond pas seulement à la Wi-Fi, à la bande large (broadband) ni aux données en masse, mais il faut progresser vers la tendance qui consiste à numériser les trois principaux paradigmes du système économique : l’énergie, les communications et la logistique (y-compris les systèmes de transport).

Les frontières virtuelles n’existent plus, ni même les frontières naturelles devant les grands problèmes mondiaux comme l’évolution démographique, les ressources alimentaires, la surexploitation des ressources terrestres, la pollution non contrôlée de la planète qui cause des problèmes à la limite de la vivabilité, de l’habitabilité et de l’équilibre de la biosphère. De grandes problématiques dont nous commençons à être plus que conscients, et que nous ne pouvons plus remettre à plus tard ni même ignorer.

Parallèlement, nous nous dirigeons inévitablement vers une nouvelle conscience sociale mondialisée qui exige un changement complet des paradigmes. Les relations verticales et de force devront progressivement céder le pas à des relations de collaboration et de partage des forces.

L’empathie et l’assertivité, mots clés du partage et de la collaboration, devront forcément intégrer des communautés fermées et conservatrices de toute dimension et de tout territoire.

Comme cela a très bien été expliqué par Jeremy Rifkin, l’histoire nous enseigne que chaque changement dans le domaine de l’énergie, des communications et de la logistique, porte le monde à l’aube d’une importante révolution économique dans toutes les sociétés du monde. De plus, comme pour tout grand changement, il est fondamental pour le futur de la vie sociale de réussir à saisir les opportunités de ces changements, en renouvelant et en adaptant le monde intérieur à une nouvelle vision globale. Désormais, l’histoire de l’homme et des civilisations est inévitablement liée à une dimension mondiale.

Les évènements paradigmatiques de la troisième révolution industrielle décrits par Jeremy Rifkin ont déclenché la plus grande accélération de l’évolution jamais observée dans l’histoire de l’Homme. Il ne tient bien sûr qu’aux Hommes de tirer profit de ces nouvelles opportunités d’autant plus qu’ils ont conscience de cette possibilité de changer.